Édito #1 : le 15 janvier, moi ? ça va…
Parce que le 15 janvier est désormais connu du monde entier comme le jour le plus déprimant.
Ce matin où moi aussi j’ai osé dire NON !
Certains diront : « C’est pas trop tôt. » / D’autres penseront : « Jamais trop tard. »
Evidemment, quelques-uns y verront une de mes bonnes résolutions, mais peu se douteront qu’il s’agit simplement d’un mal de saison. En 2018, le Zen News est de retour. Désormais, il ne mâche plus ses mots.
Déjà le dimanche soir sentait le blues
… l’eau du bain, le bain de mousse, les mousses de bulles, la bulle de blues.
« On ne met pas la table, on ne fait pas un vrai dîner. Chacun va tour à tour piocher au hasard de la cuisine un casse-croûte encore endimanché – très bon le poulet froid dans un sandwich à la moutarde, très bon le petit verre de bordeaux bu sur le pouce, pour finir la bouteille. Les amis sont partis sur le coup de six heures.Il reste une longue lisière. On fait couler un bain. Un vrai bain de dimanche soir, avec beaucoup de mousse bleue, beaucoup de temps pour se laisser flotter entre deux riens ouatés, brumeux. Le miroir de la salle de bains devient opaque, et les pensées se ramollissent.
Surtout ne pas penser à la semaine qui s’achève, encore moins à celle qui va commencer.
Se laisser fasciner par ces petites vagues au bout des doigts fripés par la mouillure chaude.
Et puis, quand tout est vide, s’extirper enfin.
Prendre un bouquin? Oui, tout à l’heure. À présent, une émission télévisée fera l’affaire.
La plus idiote conviendra. Ah – regarder pour regarder, sans alibi, sans désir, sans excuse!
C’est comme l’eau du bain: une hébétude qui vous engourdit d’un bien-être palpable. On se croit tout confortable jusqu’à la nuit, en pantoufles dans sa tête.
Et c’est là qu’elle vient, la petite mélancolie. Le téléviseur peu à peu devient insupportable, et on l’éteint. On se retrouve ailleurs, parfois jusqu’à l’enfance, avec de vagues souvenirs de promenades
à pas comptés, sur fond d’inquiétudes scolaires et d’amours inventées. On se sent traversé.
C’est fort comme une pluie d’été, ce petit vague à l’âme qui s’invite, ce petit mal et bien qui revient, familier – c’est le dimanche soir.
Tous les dimanches soir sont là, dans cette fausse bulle où rien n’est arrêté. Dans l’eau du bain les photos se révèlent. »
Philippe Delerm in, « La première gorgée de bière, et autres petits plaisirs minuscules »
Et d’un coup, c’est lundi…
Alors quand sonne le réveil, j’ai juste pas envie. La matinée se traine et quelque soit l’heure, je n’ai pas le coeur…
A 11h, j’ai beau inclure – croire en la reconnaissance valorisée, aux vertus du développement, à l’implication et à l’engagement ; j’ai beau compter sur la proximité et même aller jusqu’au bien-être. Rien ! – ou déclure – frapper, taper, cogner, danser, marquer le temps de la séparation –, mes collègues ont beau être des Anges, j’ai juste des envies de Nesting. Non pas de Nestea, ayant toujours préféré la fausse nature du May Tea, mais bien de Nesting.
S’il vous plait, offrez moi une RTT, un vrai moment de pause en français !
Offrez moi un moment de sitting, un vrai rêve en nesting : une journée pour rester chez moi, pour simplement rallongé le weekend ou totalement m’abandonner : « Je ne suis jamais bien nulle part, et il me semble toujours que je serais mieux ailleurs que la où je suis. »
Alors, donnez-moi le droit de déprimer franchement. Allez, faites-moi ce cadeau. Aujourd’hui, je ne subirai plus, je n’agirai plus non plus (promis je vais essayer). Me voilà un proactif de dépression, excusé par le calendrier et salué par la mondialisation. J’annonce, le 15 janvier c’est ma journée, c’est scientifique et prouvé : c’est le jour le plus déprimant de l’année !
- forcément un lundi, premier jour d’une longue semaine,
- plutôt vers la fin du mois, mais pas trop, quand le salaire n’est pas encore tombé,
- quand les finances sont déjà au plus bas, quand on a déjà tout donné pour les dépenses des fêtes de fin d’année,
- quand Noël est déjà loin et les résolutions du Nouvel An presque oubliées,
- quand la météo ne semble pas vouloir nous aider.
Un jour déal pour entamer une démarche vers la reconnaissance névrotique : comprendre qu’aujourd’hui je ne suis pas à Paris, que je suis loin du Spleen et plus proche de Mike Brant que de Baudelaire : j’en suis même à accepter mes envies suicidaires.
En ce lundi 15 janvier, je n’ai plus grand chose à défendre, plus la fougue des grands projets, plus d’évenement à organiser, mes perspectives semblent limitées. Me voilà totalement largué, emporté par le règne du rien !
Mais rien est souvent ce que l’on fait de mieux – alors LESS IS MORE
Rien c’est ce que l’on dit de plus fort – alors SILENCE
Mais, si rien n’est pas rien, le rien peut sans doute évoquer autre chose. Le rien peut parfois être riche DU PLEIN ?
Réveillons-nous, il est 6h42, c’est 3ème lundi de l’année, celui où il fait bon déprimé car c’est fixé au calendrier. Comme c’est écrit, aucune envie de se forcer… Comme un lundi, il flotte aussi une envie saine, celle de démarrer la semaine. Et pour le reste, croyez-moi, ça ira mieux demain.